Des paysages et des espèces fragiles
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Des paysages et des espèces fragiles

Les principales colonies d’oiseaux marins de France métropolitaine sont relativement bien suivies par les ornithologues, qui y dénombrent les couples reproducteurs chaque année. Ce travail de dénombrement a mis en évidence le confinement des sites de reproduction, placés essentiellement dans des zones protégées, quelles que soient les régions. On peut citer les exemples suivants : la colonie de sternes caugek de la réserve naturelle du Banc d’Arguin en Gironde, les goélands railleurs de Camargue, les sternes pierregarins de la réserve naturelle du Platier d’Oye, les avocettes élégantes de la réserve naturelle de Lilleau des Niges etc.

puffin cendré

Cet aspect nuance quelque peu le constat de richesse de l’avifaune de nos côtes. Le confinement des oiseaux à des sites protégés en période de reproduction leur assure certes un bon succès reproducteur, mais démontre surtout qu’en dehors de ces périmètres de faible surface, ils ne trouvent pas facilement les conditions nécessaires à leur maintien.

Le littoral représente un espace réduit qui fait l’objet de toutes les convoitises de la part de l’homme : aménagements portuaires, loisirs de plein air, construction, chasse, pêche, aquaculture, nautisme, pollution…

L’ensemble de ces activités occupe l’essentiel de l’espace littoral et continue de grignoter des surfaces qui ne sont plus accessibles aux oiseaux nicheurs.

Réserve naturelle de Lilleau des Niges (île de Ré)

La pollution de l’eau et la surexploitation de l’ensemble des ressources agissent comme autant de facteurs qui diminuent leurs chances de survie, cela a très probablement entraîné le déclin des macareux et des guillemots, jadis nombreux le long des côtes bretonnes au printemps.

En ce qui concerne le littoral français d’outre-mer, on peut dresser un constat tout aussi préoccupant. Les oiseaux marins demeurent cantonnés aux sites protégés et/ou inaccessibles. C’est le cas notamment du pétrel de Barau, de l’île de la Réunion. Il se reproduit dans les falaises inaccessibles du piton des Neiges, à plus de 2000 mètres d’altitude. Cette espèce, très menacée, figure en catégorie “en danger” au niveau mondial.

En Guyane, la seule colonie importante d’oiseaux marins se trouve sur l’île du Grand-Connétable, située à 16 km du rivage. Elle abrite une population remarquable de sternes de Cayenne, estimée à 30% de l’effectif mondial ! Ce site héberge également de nombreuses frégates superbes et la mouette atricille. Cette dernière y niche sur le site le plus méridional de son aire de distribution. Le reste du littoral guyanais ne manque pas d’intérêt. Ainsi, les vasières et les mangroves qui couvrent une bonne partie de la côte forment un énorme site d’importance internationale pour l’hivernage des oiseaux d’eau (becs-en-ciseaux, bécasseaux semi-palmés, ibis rouges, spatules rosées…)

Le littoral des Antilles revêt aussi une importance capitale pour les oiseaux côtiers. Ainsi, la Guadeloupe compte cinq sites d’importance internationale qui hébergent des colonies d’oiseaux marins : les falaises du Nord-Grande-Terre ; le Grand Cul-de-sac marin, la pointe des Châteaux, les îlets de la Petite-terre et les falaises nord ainsi que l’îlet de Vieux-Fort de Marie-Galante.

Les milieux littoraux de France métropolitaine et d’outre-mer accueillent des espèces que l’on considère comme les plus menacées au monde. Le travail de BirdLife International, qui élabore les listes rouges des oiseaux menacées au niveau mondial, a montré que la France et l’ensemble des territoires sous administration en abritent 78. Ces oiseaux risquent de disparaître dans les décennies à venir si rien n’est entrepris pour les sauvegarder. Ils pourraient connaître le même sort que le courlis à bec grêle, jadis fréquent, et dont la dernière donnée d’observation documentée date de 1967 dans l’anse de l’Aiguillon. Ce “score” de 78 espèces place la France et l’outre-mer en neuvième position parmi les pays qui comptent le plus d’espèces d’oiseaux menacés. Il est à noter que 44 espèces d’oiseaux du littoral figurent dans cette liste rouge.

Cela signifie que plus de la moitié des oiseaux menacés de France dépendent de la protection des espaces côtiers et des zones humides ! Deux familles se distinguent particulièrement : les puffins et pétrels d’une part, les albatros d’autre part. Les puffins et pétrels comptent 17 espèces menacées, dont le rare puffin des Baléares, qui ne se reproduit qu’aux îles Baléares et migre le long des côtes de Métropole. La grande majorité des albatros est menacée au niveau mondial : sur les 22 espèces décrites, 18 sont menacées. Parmi les 15 qui sont observées dans les eaux territoriales françaises, 12 sont menacées. Six des sept espèces nicheuses des terres australes et antarctiques françaises sont dans ce cas.

L’albatros d’Amsterdam constitue en matière de conservation des oiseaux la priorité extrême, pour laquelle la France est investie d’une responsabilité de premier plan. Cette espèce ne se reproduit que sur l’île d’Amsterdam, à raison de 25 couples installés chaque année, soit un total d’une cinquantaine de couples reproducteurs seulement ! Il est considéré comme “en danger critique d’extinction”.

Même les mers australes n’échappent pas aux menaces dues à l’exploitation des ressources halieutiques. Là-bas, c’est la pêche à la palangre qui représente une menace majeure, puisque de nombreux albatros périssent noyés, accrochés par les hameçons en essayant de s’emparer des appâts.

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