Histoire du Golden Retriever
Des sous-bois au salon
En matière de généalogie, comme pour la plupart de ses congénères, le Golden retriever baigne dans une relative incertitude, façonnée par les fantasmes. Plus d’un siècle d’histoire qui se raconte au fil des légendes.
À nouveau chasseur, nouveau chien
Le milieu du XIXe siècle s’avère propice à l’apparition d’un chien « nouveau ». En effet, l’évolution des techniques de chasse et le perfectionnement des armes à feu imposent de nouvelles habitudes et donc de nouveaux partenaires. Les chiens leveurs de gibier, souvent des chiens d’arrêt, ne permettent plus de faire face à ces besoins. Partant du principe que, malgré des armes de plus en plus perfectionnées, les oiseaux ne sont pas systématiquement abattus net, il devient nécessaire de développer une race capable de retrouver et de rapporter les blessés.
Ainsi naissent les « retrievers », du verbe anglais to retrieve, qui signifie « rapporter » ! Les gentlemen de Grande-Bretagne se mettent à l’ouvrage, mêlant les nombreuses lignées de chiens d’arrêt d’origine britannique (pointer, setter…) à des races locales qui se sont illustrées dans le travail à l’eau, notamment les tweed water spaniels, race aujourd’hui disparue. Ces chasseurs très british mêlent leur sang à celui de leurs compères d’outre-Atlantique, descendants des premiers chiens importés par les émigrants.
Né de la légende
Mais qu’en est-il du Golden ? On peut prétendre, sans trop se tromper, qu’il est probablement issu de la même souche que le labrador, améliorée par des croisements successifs, notamment avec des retrievers à poil plat jaune venant de Terre-Neuve, des setters irlandais ou des spaniels d’eau d’Écosse. Mais il existe d’autres versions. Selon la légende, des chiens jaunes du Caucase furent utilisés en Écosse pour rapporter le gibier blessé. On les appela russian yellow retrievers (les retrievers jaunes de Russie). Ils auraient été retrempés avec du bloodhound pour donner naissance au golden retriever.
La troisième version fut colportée par Lord Tweedmouth, un gentleman écossais qui vécut au XIXe siècle et que l’on considère comme le « maître fondateur » de la race. Cet homme richissime avait une grande passion pour l’élevage. Son cheptel comptait des bovins, des poneys et des chevaux, ainsi que des chiens, afin de satisfaire son goût pour la chasse. On prétend qu’en 1865, il reçut, en paiement de la dette d’un cordonnier de Brighton, le premier retriever jaune, nommé Nous, le seul d’une portée noire de wavy coated retriever.
La station balnéaire de Brighton, sur la côte sud de l’Angleterre, est aussi un port pour les bateaux pratiquant la pêche au large de Terre-Neuve. Des chiens locaux avaient peut-être traversé l’Atlantique lors d’échanges commerciaux…
« Nous » est ensuite accouplé avec Belle, une tweed water spaniel de couleur foie. C’est probablement ainsi que naît, en 1868, la première portée d’une lignée qui donnera un jour naissance au golden retriever. Lord Tweedmouth s’emploie alors à sélectionner un chien qui convient à merveille à ses exigences de gentleman chasseur. Au fil des accouplements, mêlant les modèles, les robes et les couleurs, cet homme d’expérience façonne une race à son image. Chiots noirs, chiots jaunes, étalon setter…. Un cocktail talentueux jusqu’à son décès en 1894. C’est grâce à son minutieux travail de sélection que la race a trouvé son identité et a connu un si bel essor.
Bête de scène ?
L’origine du premier golden suscite bien des polémiques ! Aux côtés de la version « presque » officielle, s’est répandue une histoire aussi romantique qu’incertaine, mais qui concourt à la légende de la race. En 1858, Lord Tweedmouth, un jeune noble écossais, assiste à une représentation de cirque dans la station balnéaire britannique de Brighton. Émerveillé par le numéro réalisé par de grands chiens jaunes provenant du Caucase, il décide d’acheter deux d’entre eux. Leurs maîtres refusent fermement de céder leurs « artistes ». Mais une somme coquette achève de les convaincre. Et c’est finalement l’ensemble de la troupe, soit huit chiens et chiennes, qui prennent la route de l’Écosse. Grâce à ses traqueurs russes, Lord Tweedmouth entreprend de créer sa propre race, ne faisant appel à de nouveaux chiens importés pour varier les courants de sang que beaucoup plus tard, vers 1880. Cette légende reste intacte, mais personne n’a jamais pu attester la véracité de ces propos, ni même retrouver la trace de ces chiens jaunes venus du Causase. On suppose que Lord Tweedmouth n’a répandu cette « fable » que dans le seul but d’égarer ses rivaux éventuels et de garder la « recette » du golden pour lui seul !
Un siècle de succès
Tout au long de ces années, Lord Tweedmouth reporta scrupuleusement tous les accouplements dans son livre des origines, document conservé par le Kennel Club anglais et rendus publics en 1960. En 1903, ce dernier accepte l’enregistrement des premiers individus dans la variété golden. Le Golden Retriever Club of England voit le jour en 1911, et le « chien à la robe d’or » est enfin reconnu comme race à part entière. Il faudra attendre plus de vingt ans pour que le bel animal traverse la Manche : il est présenté à Paris en 1925, à l’occasion de la 51ᵉ exposition canine.
Le premier standard de 1911 n’est plus celui qui est appliqué de nos jours, il a subi maintes refontes pour obtenir un « pedigree » définitif en 1936. La race désormais fixée connaît un engouement sans précédent, surtout auprès des chasseurs. Déjà à l’époque, la publicité s’empare de ce symbole, efficace sur le terrain, mais surtout particulièrement séduisant et sympathique. Ce n’est que bien plus tard, dans les années 1980, que le golden change de cap et s’installe dans les familles. Des sous-bois au salon, il n’a jamais cessé de faire sensation, et le troisième millénaire semble vouloir signer son apogée !