Oiseaux
Les oiseaux
Aucun groupe animal n’éveille sans doute notre intérêt autant que celui des oiseaux. Ces vives créatures, remuantes et actives, ont une vie instinctive très riche et des capacités vocales exceptionnelles. Elles sont l’ornement de la nature dans toutes les régions du globe. Les innombrables variétés d’espèces animent les zones tropicales et subtropicales, abonde dans les zones tempérées, leur chant harmonieux se fait entendre jusque dans la haute montagne et les régions circumpolaires où l’homme ne résiste que grâce à sa technique. Forêts, champs, prés, eaux, steppes ou déserts, nous ne pouvons les imaginer sans leurs habitants ailés, qui nous sont si sympathiques. Notre époque pressée et affolée de technique pousse l’homme à rechercher, après de longues heures de travail et de hâte, le délassement auprès de ces aimables créatures vivantes, dans leur milieu naturel hélas souvent gâté par l’homme lui-même. C’est ce qui explique l’intérêt croissant envers la gent ailée. On rencontre, dans les endroits les plus reculés, des individus ou des groupes armés d’un trièdre et d’un carnet de notes, écoutant le chant des oiseaux, les observants, s’efforçant de percer le mystère de leur vie. Cet intérêt a multiplié le nombre des livres et des manuels qui tentent d’élever le niveau de la connaissance théorique des oiseaux, et de la rendre accessible au public par des illustrations. Caractéristiques des oiseaux Il y a des millions d’années, les oiseaux ont évolué à partir des reptiles avec lesquels ils ont encore des caractères communs : peau dépourvue de glandes, crâne relié à la colonne vertébrale par un seul condyle occipital, même disposition des appareils excréteurs et sexuels, similitude de développement des embryons. Ils s’en distinguent par la température corporelle constante (moyenne 41°C) indépendante de la température ambiante. Ils sont parfaitement adaptés au vol. Les quelques espèces incapables de voler sont passés au mode de vie terrien de façon catégorielle, car ils ont conservé dans leur structure les caractères de leurs parents ailés. Le corps de l’oiseau est couvert de plumes, les membres supérieurs sont devenus des ailes, au sol l’oiseau se sert de ses pattes pour se déplacer. Celles-ci ont quatre doigts ou trois, exceptionnellement deux chez l’Autruche. Le front est devenu un bec corné, propre à la famille avienne, sauf quelques exceptions chez les mammifères. Le cœur, comme celui de ces derniers, est divisé en deux chambres et deux antichambres ; moitié gauche et moitié droite, donc circulation artérielle et veineuse complètement séparée. Les poumons sont relativement petits et peu mobiles. Les bronches traversent tout le poumon et se terminent par de grands sacs aériens. Il y en a généralement trois paires placées dans diverses parties du corps et qui pénètrent même dans les os. Ces sacs aériens sont un renfort à la respiration, surtout en cours de vol. Tout comme les reptiles, les oiseaux se reproduisent par des œufs, mais les leurs ont une coquille calcaire dure. L’embryon se développe le plus souvent à la chaleur du corps des parents qui couvent un certain temps et s’occupent encore de leurs petits après l’éclosion. Couverture du corps Dans le règne animal, seuls les oiseaux ont le corps couvert de plumes. On en conclut qu’il s’agit de la transformation des écailles des reptiles, au cours d’une évolution longue et compliquée. La plume, fine et légère substance cornée, est une production de la peau. Sa fonction est la protection, c’est un parfait isolant de chaleur en face du milieu ambiant ; certaines plumes servent au vol (les rémiges et les rectrices). La silhouette du corps de l’oiseau est formée par les plumes de contour, ce sont les plumes avec calamus ou tuyau, la hampe et les vexilles. Les rémiges et les plumes rectrices, qui ont des vexilles puissamment développés, sont des adaptations fonctionnelles des plumes de contour. Le duvet est un type spécial de plumes, au calamus court et mou, avec des touffes de barbes et barbules en guise de vexilles. Le duvet forme la chaude couverture du corps sous les plumes de contour, c’est le premier vêtement des oisillons après l’éclosion. Chez certains oiseaux à glande europygienne réduite (Perroquets, Grues, Hérons), le duvet produit une poudre remplaçant l’huile dont d’autres oiseaux s’oignent les plumes. Les plumes ne sont disposées uniformément que sur le corps des Kamichis, Manchots, Ratites. Chez toutes les autres espèces, elles poussent en zones dites ptérylies, séparées par des zones dites aptéries, qui sont couvertes par les plumes de contour du bord des ptérylies. Les plumes d’oiseaux n’ont pas la densité d’implantation des poils de mammifères. Les petites espèces du Colibri ont environ un millier de plumes, le Cygne en a de vingt à trente mille. La couleur de la plume est donnée par sa structure et par une teinture dite pigment. C’est surtout la mélanine, qui donne les teintes noires jusqu’au brun clair, puis le lipochrome, qui donne les tons rouges et jaunes. Les différentes nuances résultent de la combinaison de ces pigments. On ne trouve pas de couleur bleue ou violette chez les oiseaux. Cette coloration est donnée par la structure de petites couches cornées des plumes sur lesquelles se réfracte la lumière. À époques régulières, le plumage des oiseaux se renouvelle par la mue. La plupart des oiseaux muent deux fois l’an. Après la nidification, en été et en automne, toutes les plumes se renouvellent. Une autre mue partielle se fait avant la nidification. Les oiseaux acquièrent alors un plumage plus brillant, dit « plumage de noces ». Certaines espèces ne muent qu’une fois tous les deux ans, d’autres trois fois par an. Les rémiges et les rectrices sont muées progressivement pour que l’oiseau ne perde pas sa capacité de voler. Seuls les Canards, les Oies, les Grues et quelques autres oiseaux subissent une mue complète qui les rend incapables de voler durant un temps assez court, et les contraint de vivre à l’abri.
Bécasseau cocorli
Bien qu’il soit souvent observé en compagnie du bécasseau minute (calidris minuta), qui lui ressemble, le bécasseau cocorti est relativement facile à identifier. En effet, c’est l’un des seuls bécasseaux à arborer un plumage nuptial teinté de roux, et le seul à avoir le croupion blanc. En outre, ses cris et sa posture au sol sont typiques Un bécasseau au croupion blanc et au dos roux. Le bécasseau cocorli se distingue des autres bécasseaux par son plumage. En effet, il est le seul à être pourvu d’un croupion blanc et l’un des rares à arborer un dessus roux en période nuptiale. Des cris roulés Si le bécasseau cocorli se déplace fréquemment en compagnie d’autres limicoles de même allure, il est néanmoins reconnaissable à ses cris variés et caractéristiques. En vol, il émet des sons aigus et roulés, « tchir-rip tchirrip », qui sont parfois enchaînés, formant des trilles. Par ailleurs, lorsqu’il se sent menacé, le bécasseau cocorli laisse entendre des appels brefs et nerveux : « wik wik wik », « pit pit ». Dépendant de la marée Les rives des lagunes côtières et les eaux douces peu profondes sont les terrains de chasse privilégiés du bécasseau cocorli. Ce petit limicole s’alimente aussi bien de jour que de nuit. Seul l’état de la marée conditionne ses allées et venues. Pour chercher sa nourriture, il sonde minutieusement la vase, à l’aide de son long bec fin et légèrement arqué. Ensuite, lorsqu’il s’est saisi d’une proie, il la rince soigneusement dans l’eau. Ce dernier bain permet d’éliminer l’excès de sable. Vers, mollusques et crustacés Le régime alimentaire du bécasseau cocorli est principalement constitué de vers. Néanmoins, il est largement complété par de petits mollusques, des crustacés et des sangsues. De nombreux insectes (des mouches et des scarabées en particulier) sont également ingérés. Plus rarement, le bécasseau corcoli se nourrit de petites graines. Un nid dissimulé dans la lande Le bécasseau cocorli se reproduit dans la toundra arctique entre mai et juillet. Au début du mois de juin, le mâle délimite son territoire en effectuant un vol qui alterne planés et lents battements d’ailes. Généralement, le même territoire de nidification est conservé d’une année sur l’autre. Le nid, une dépression garnie d’herbe et de lichen, est établi à proximité d’un étang ou d’un marécage, dans la lande ou les broussailles. Dissimulé dans la végétation basse, il accueille, à la fin du mois de juin, quatre œufs verdâtre mouchetés de brun. Ordre Charadriiformes Famille Scolopacidés Longueur 18 à 23 cm Poids 45 à 90 g Habitat Lagunes côtières, plages de sable, vasières littorales Alimentation Vers, mollusques, crustacés, insectes Vol Rapide, direct et soutenu Cri, chant Cri bref et roulé « tchirrip » Nid Cuvette creusée dans le sol, recouverte d’herbe et de lichen Vie sociale Petits groupes Observation Facile. Le bécasseau cocorli est relativement facile à observer. Il se déplac en petits groupes le long des côtes, souvent en compagnie du bécasseau minute. Période favorable d’observation Janvier, février, mars, juillet, Novembre et Décembre. Le bécasseau cocorli fait étape en France lors de ses migrations entre l’Afrique et la Sibérie. On peut observer ce limicole d’avril à juin et d’août à octobre Espèces proches Les bécasseaux maubèche (colidris canutus) et sanderling ( calidris alba) appartiennent également à la famille des scolopacidés. En été, le dos sombre du bécasseau maubèche contraste fortement avec son dessous roux orangé. Le bécasseau sanderling, en revanche, a un plumage très différent ; son dos sombre et marbré met en valeur son dessous d’un blanc immaculé. Contrairement au bécasseau cocorli, qui est doté d’un long bec, fin et recourbé, ces deux oiseaux ont un bec court, épais et droit. Vol Le bécasseau cocorli se déplace généralement en ligne droite, d’un val rapide, soutenu et direct. Néanmoins, il effectue parfois des changements brusques de direction. Comportement Lorsqu’ils arpentent les lagunes côtières à la recherche de nourriture, les bécasseaux cocorli se mêlent à d’autres petits échassiers. C’est en compagnie de bécasseaux minutes (calidris minuta) qu’ils sont le plus fréquemment observé. Un très grand migrateur En France, le bécasseau cocorli est un visiteur régulier que l’on peut observer, au printemps et à la fin de l’été, dans les vasières littorales et les lacs intérieurs. Lors de sa migration post-nuptiale, cet oiseau originaire de Sibérie fait étape sur les côtes françaises, avant de repartir vers l’Afrique. Dans la toundra humide Le bécasseau cocorli niche dans la tondra humide du nord de la Sibérie. Lors de son passage en France, il fréquente les lagunes côtières, les marais salants, les vasières littorales, mais aussi les eaux douces peu profondes situées à l’intérieur des terres. Par ailleurs, le bécasseau cocorli s’aventure plus profondément dans les étendues d’eau que les autres petits échassiers. Un limicole originaire de Sibérie En période de nidification, la répartition du bécasseau cocorli est limitée à l’extrême nord de la Sibérie. L’espèce est principalement présente sur le littoral. Des cas de nidification ont été recensés en Islande, au Spitzberg et au nord de l’Alaska, mais cela reste accidentel. Si l’aire de répartition de l’espèce est limitée en période de nidification, elle est, en revanche, très vaste le reste de l’année. En effet, elle comprend la majeure partie des littoraux d’Afrique, d’Asie du Sud et d’Océanie. Une très longue migration La migration du bécasseau cocorli se fait en deux étapes : les adultes partent dans le mois de juillet (les mâles s’envolent trois à quatre semaines avant les femelles), tandis que les jeunes entament leur périple au mois de septembre. Lorsque les juvéniles effectuent leur première migration, ils restent deux à trois ans sur leur territoire d’hivernage avant d’effectuer leur voyage de retour. Diverses routes migratoires Le bécasseau cocorli est parfois obligé de survoler les mers, mais sa migration est principalement inter-continentale. On distingue différentes routes migratoires. Les populations vivant dans l’ouest de l’aire de nidification gagnent l’Afrique via les côtes d’Europe occidentale ou via l’Europe de l’Est. Les bécasseaux cocorli venant de l’est traversent la Sibérie pour gagner le sud de l’Inde, le Sri-lanka, le sud de l’Asie et l’Océanie. Migration Le bécasseau cocorli compte parmi les oiseaux qui effectuent les plus grandes migrations. En effet, il réalise un voyage de plus de 30 000 km lorsqu’il quitte le nord de la Sibérie pour gagner l’Afrique du Sud. En outre, il peut parcourir plus de 800 km en une seule nuit ! Menaces sur l’espèce A l’heure actuelle, le bécasseau cocorli n’est pas une espèce menacée. Néanmoins, comme de nombreux limicoles migrateurs, ce bécasseau est fortement dépendant de la présence et de la qualité des zones humides.
Barge rousse
Limosa lapponica La barge rousse est un oiseau qui niche dans la toundra arctique et subarctique. Elle effectue de grandes migrations vers les rivages africains, asiatiques ou australiens selon la longitude de son aire de départ. A l’occasion de ces migrations, elle s’arrête sur les côtes de France, où certains individus hivernent. Un limicole venu du grand Nord Venant du nord de l’Eurasie, de grandes troupes de barges rousses arrivent sur les côtes de la Manche et sur la côte atlantique en automne. Ces limicoles arborent alors un plumage brun grisâtre finement strié de brun jusqu’à la poitrine. Ils possèdent un sourcil blanchâtre et le ventre blanc. Leur croupion, blanc dessous, est barré dessus, ce qui est l’un des critères permettant de les identifier. Contrairement aux barges à queue noire, les barges rousses n’ont pas de barre alaire blanche et, à la différence de celles-ci, elles se montrent relativement silencieuses en dehors de la saison de reproduction. Une nicheuse des contrées froides Au printemps, les barges rousses se reproduisent dans le nord de l’Eurasie. On les retrouve dans la toundra, surtout dans les zones de végétation basse (lichen, herbes, broussailles), les tourbières, les vallées humides et parfois jusqu’à l’orée des forêts. Leur régime alimentaire se compose essentiellement d’insectes (mouches, coléoptères), de chenilles, de vers de terre et, occasionnellement, de baies et de graines. Une hivernante côtière Durant sa migration, la barge rousse affectionne la zone de balancement des marées, avec une préférence pour les baies fermées, les estuaires et les îlots sableux. Son régime alimentaire diffère complètement de celui d’été. Lorsque la marée descend, on la voit se nourrir à la limite des vagues ou dans l’eau, à une profondeur d’environ 15 cm. Elle mange des vers marins (néréis et arénicoles), des crevettes et des puces de mer. A marée haute, les barges rousses se concentrent sur les rochers ou les îlots, attendant que les vasières soient de nouveau découvertes. Sociable en toute saison On observe la barge rousse en larges bandes en hiver, prospectant les vastes étendues émergées à marée basse, ou en groupes sur des reposoirs en attendant la marée descendante. Souvent, ces bandes se composent de plusieurs limicoles, comme les bécasseaux maubèches, les huîtriers pie et les courlis courlieux. Durant la reproduction, la barge rousse niche également en colonie, plus ou moins lâche dans les strates herbacées et forestières de la toundra. Ordre Charadriiformes Famille Scolopacidés Longueur 33 à 42 cm Poids 195 à 450 g Habitat Côtes et vasières en Hiver Alimentation vers, crevettes, mollusques cri « Kirrik » rauque en vol ou « kéouèk » nasal ; « Krick » aigü comme cri d’alarme Nid Creux au sol, tapissé de lichen et de feuilles Ponte 4 oeufs Couvaison 20 à 21 jours Chant mélodieux Vie sociale grégaire Observation Facile, la barge rousse est un oiseau grégaire ; on l’observe sur les vasières en larges bandes, souvent associée à d’autres espèces de limicoles. Période favorable à l’observation Avril, mai, juin, juillet, août – La barge rousse vient hiverner sur les côtes ouest et nord de la France. On peut donc l’observer de l’automne au printemps. Espèces proches : Dans la famille des scolopacidés, les espèces les plus proches de la barge rousse sont les autres espèces de grande taille. La barge à queue noire (limosa limosa), qui lui ressemble le plus, le courlis corlieu (numernius phaeopus), le courlis cendré (numenius arquata), l’huitrier pie (haematopus ostralegus), l’échasse blanche (himantopus himantopus) et l’avocette élégante (recurvirostra avocetta). Reproduction : L’été polaire est court et la végétation n’est présente que brièvement. La saison de reproduction est donc brève. Le mâle revêt pour l’occasion un beau plumage roux et se fait davantage entendre. Il émet un son plus agréable que le « kéouèk » nasal habituel de l’espèce. Le nid est construit au sol, dans une tourbière. C’est un creux tapissé de lichen et de feuilles de bouleau. Les quatre œufs olive tachetés de sombre sont couvés pendant trois semaines par les parents. Les poussins quittent le nid juste après l’éclosion, dès qu’ils sont secs et suivent leurs parents en quête de nourriture. De longues migrations difficiles La barge rousse parcourt des milliers de kilomètres pour rejoindre son lieu d’hivernage, en faisant étape chaque année sur les mêmes sites pour se nourrir et se reposer. Ces sites sont peu nombreux et, lorsqu’ils sont trop perturbés, les oiseaux ne s’y arrêtent plus, ce qui rallonge leurs étapes. Une étape sur nos côtes La barge rousse niche dans les zones arctiques et subarctiques le long de l’océan Arctique, de la Norvège à l’Alaska. A l’automne, les oiseaux partent pour les côtes de l’Europe de l’Ouest, de l’Afrique, du sud, de l’Arabie et de l’Iran, de l’Asie, du sud-Est et de l’Australie. Ces destinations dépendent des lieux de nidification de départ. Diverses menaces Cette espèce est vulnérable, car, au cours de sa migration, elle s’arrête en quelques endroits favorables sur les côtes ouest de l’Europe. Ces sites littoraux humides, où se concentrent de nombreux limicoles migrateurs, sont en nombre réduit. Pour que la migration se passe bien, ces sites doivent rester calmes et conserver un potentiel alimentaire suffisant et de bonne qualité. Lorsque les oiseaux sont dérangés, il a été montré qu’ils dépensent un supplément d’énergie, ce qui peut avoir des conséquences défavorables sur la reproduction future et sur la survie de l’espèce. Ainsi, ce sont essentiellement la perte de ces sites favorables rares (liée à des constructions), la pollution et le dérangement qui menacent la barge rousse. Des mesures conservatoires Même si un certain nombre de sites privilégiés de passage de ces oiseaux sont déjà enregistrés comme des aires ornithologiques d’importance » (en anglais, IBA), essentiellement en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas, la construction de marinas, la surexploitation des coquillages ou le développement du tourisme continuent à l’intérieur même de ces zones, pourtant reconnues particulières. En France et au Portugal, de nombreuses zones de passage pour oiseaux migrateurs ne sont toujours pas protégées. Cependant, lorsqu’une réelle protection est mise en place, tous les oiseaux sont attirés vers ces zones exemptes de nuisances, où ils se concentrent. Effectifs : Les barges rousses nichant dans le nord-ouest de l’Eurasie hivernent sur les côtes européennes : on estime leurs effectifs à environ 125000 individus, hivernent en Afrique (haltes en Europe), en Asie et en Australie Où l’observer ? En France, on peut observer la barge rousse lors de ses haltes migratoires sur les côtes nord et ouest. On la trouve dans les zones littorales humides, protégées ou non perturbées, comme la baie de Somme ou l’île de Ré.
Les actions de conservation
Les comptages réguliers effectués par le réseau national des ornithologues apportent des indications sur la capacité d’accueil des zones humides et l’évolution de leur intérêt ornithologique. Ces informations récoltées permettent de réaliser une évaluation quantitative et qualitative des sites prioritaires pour la conservation, tels que reconnus par la convention de Ramsar. Cette convention pour la protection des zones humides, signée en 1971 à Ramsar, en Iran, reconnaît l’intérêt international pour les oiseaux d’eau des sites qui hébergent au moins 1% d’une population biogéographique et/ou 20 000 oiseaux d’eau présents simultanément. Toutes les zones côtières qui atteignent ces seuils d’importance internationale sont incluses dans le réseau des zones importantes pour la conservation des oiseaux (Zico), dont l’inventaire national a été publié par la LPO en 1994. En raison de l’intérêt international évident que représentent les sites côtiers de Métropole, ils ont été intégrés au réseau Natura 2000, selon la réglementation européenne (directive oiseaux 79/409/CEE). Cette directive stipule que les États membres de l’Union européenne sont tenus de protéger les oiseaux menacés et migrateurs ainsi que de maintenir en bon état de conservation les sites majeurs qui les hébergent, où la gestion menée doit prendre en compte leurs exigences biologiques. Les mesures de protection nationales et locales, prises notamment dans le cadre de la loi de protection de la nature de 1976, se sont révélées très efficaces pour la survie de nombreuses espèces d’oiseaux du littoral. Cette loi a permis la création de réserves naturelles côtières qui assurent le maintien des oiseaux nicheurs et migrateurs. Le réseau des sites protégés joue aussi un rôle très important pour la sensibilisation générale à la préservation des espèces sauvages et leurs milieux de vie. L’accueil du public et les activités de visites y sont organisés par les gestionnaires qui émanent de divers organismes : association de protection de la nature, syndicats mixtes, office national de la chasse et de la faune sauvage, conseils généraux…. qui assurent l’animation de dizaines de milliers de visiteurs par an. La sensibilisation à la protection de la nature ne constitue en fait pas un phénomène si récent. Dès le début du XXe siècle, des projets de conservation d’oiseaux marins et de sites prestigieux voyaient le jour. Ainsi, en 1912, la LPO obtenait la création de la réserve des Sept-îles, à Perros-Guirrec. Cela a mis fin au massacre des macareux moines qui s’y pratiquait chaque année au printemps. La protection des îlots a eu un effet « attractif » sur d’autres espèces d’oiseaux marins nicheurs qui s’y sont installées ensuite, telles que le pingouin torda, le guillemot de Troïl, la mouette tridactyle, le cormoran huppé et le célèbre fou de Bassan. Aujourd’hui, cette réserve compte 12 espèces d’oiseaux marins. Les 21 000 couples nicheurs qu’elle abrite actuellement en font la colonie d’oiseaux de mer la plus importante de France métropolitaine. En matière de protection des sites du littoral, il convient de mentionner le rôle important joué par le conservatoire du littoral. Cet établissement public, créé en 1975, acquiert des espaces littoraux afin de les protéger de manière définitive. Il agit en Métropole, dans les départements d’outre-mer et à Mayotte. Son domaine totalise à ce jour 125 000 hectares, soit 1000 km de rivages regroupés en 600 sites naturels. Son objectif à terme est de protéger le tiers du linéaire côtier et d’en déléguer la gestion aux collectivités locales et aux organismes qui présentent une compétence dans ce domaine. Les associations de protection de la nature jouent un rôle majeur dans la gestion et le suivi de ces acquisitions, dont la LPO, qui gère des réserves naturelles désignées sur des terrains du Conservatoire en Charente-Maritime et en Vendée.
Des paysages et des espèces fragiles
Les principales colonies d’oiseaux marins de France métropolitaine sont relativement bien suivies par les ornithologues, qui y dénombrent les couples reproducteurs chaque année. Ce travail de dénombrement a mis en évidence le confinement des sites de reproduction, placés essentiellement dans des zones protégées, quelles que soient les régions. On peut citer les exemples suivants : la colonie de sternes caugek de la réserve naturelle du Banc d’Arguin en Gironde, les goélands railleurs de Camargue, les sternes pierregarins de la réserve naturelle du Platier d’Oye, les avocettes élégantes de la réserve naturelle de Lilleau des Niges etc. Cet aspect nuance quelque peu le constat de richesse de l’avifaune de nos côtes. Le confinement des oiseaux à des sites protégés en période de reproduction leur assure certes un bon succès reproducteur, mais démontre surtout qu’en dehors de ces périmètres de faible surface, ils ne trouvent pas facilement les conditions nécessaires à leur maintien. Le littoral représente un espace réduit qui fait l’objet de toutes les convoitises de la part de l’homme : aménagements portuaires, loisirs de plein air, construction, chasse, pêche, aquaculture, nautisme, pollution… L’ensemble de ces activités occupe l’essentiel de l’espace littoral et continue de grignoter des surfaces qui ne sont plus accessibles aux oiseaux nicheurs. La pollution de l’eau et la surexploitation de l’ensemble des ressources agissent comme autant de facteurs qui diminuent leurs chances de survie, cela a très probablement entraîné le déclin des macareux et des guillemots, jadis nombreux le long des côtes bretonnes au printemps. En ce qui concerne le littoral français d’outre-mer, on peut dresser un constat tout aussi préoccupant. Les oiseaux marins demeurent cantonnés aux sites protégés et/ou inaccessibles. C’est le cas notamment du pétrel de Barau, de l’île de la Réunion. Il se reproduit dans les falaises inaccessibles du piton des Neiges, à plus de 2000 mètres d’altitude. Cette espèce, très menacée, figure en catégorie « en danger » au niveau mondial. En Guyane, la seule colonie importante d’oiseaux marins se trouve sur l’île du Grand-Connétable, située à 16 km du rivage. Elle abrite une population remarquable de sternes de Cayenne, estimée à 30% de l’effectif mondial ! Ce site héberge également de nombreuses frégates superbes et la mouette atricille. Cette dernière y niche sur le site le plus méridional de son aire de distribution. Le reste du littoral guyanais ne manque pas d’intérêt. Ainsi, les vasières et les mangroves qui couvrent une bonne partie de la côte forment un énorme site d’importance internationale pour l’hivernage des oiseaux d’eau (becs-en-ciseaux, bécasseaux semi-palmés, ibis rouges, spatules rosées…) Le littoral des Antilles revêt aussi une importance capitale pour les oiseaux côtiers. Ainsi, la Guadeloupe compte cinq sites d’importance internationale qui hébergent des colonies d’oiseaux marins : les falaises du Nord-Grande-Terre ; le Grand Cul-de-sac marin, la pointe des Châteaux, les îlets de la Petite-terre et les falaises nord ainsi que l’îlet de Vieux-Fort de Marie-Galante. Les milieux littoraux de France métropolitaine et d’outre-mer accueillent des espèces que l’on considère comme les plus menacées au monde. Le travail de BirdLife International, qui élabore les listes rouges des oiseaux menacées au niveau mondial, a montré que la France et l’ensemble des territoires sous administration en abritent 78. Ces oiseaux risquent de disparaître dans les décennies à venir si rien n’est entrepris pour les sauvegarder. Ils pourraient connaître le même sort que le courlis à bec grêle, jadis fréquent, et dont la dernière donnée d’observation documentée date de 1967 dans l’anse de l’Aiguillon. Ce « score » de 78 espèces place la France et l’outre-mer en neuvième position parmi les pays qui comptent le plus d’espèces d’oiseaux menacés. Il est à noter que 44 espèces d’oiseaux du littoral figurent dans cette liste rouge. Cela signifie que plus de la moitié des oiseaux menacés de France dépendent de la protection des espaces côtiers et des zones humides ! Deux familles se distinguent particulièrement : les puffins et pétrels d’une part, les albatros d’autre part. Les puffins et pétrels comptent 17 espèces menacées, dont le rare puffin des Baléares, qui ne se reproduit qu’aux îles Baléares et migre le long des côtes de Métropole. La grande majorité des albatros est menacée au niveau mondial : sur les 22 espèces décrites, 18 sont menacées. Parmi les 15 qui sont observées dans les eaux territoriales françaises, 12 sont menacées. Six des sept espèces nicheuses des terres australes et antarctiques françaises sont dans ce cas. L’albatros d’Amsterdam constitue en matière de conservation des oiseaux la priorité extrême, pour laquelle la France est investie d’une responsabilité de premier plan. Cette espèce ne se reproduit que sur l’île d’Amsterdam, à raison de 25 couples installés chaque année, soit un total d’une cinquantaine de couples reproducteurs seulement ! Il est considéré comme « en danger critique d’extinction ». Même les mers australes n’échappent pas aux menaces dues à l’exploitation des ressources halieutiques. Là-bas, c’est la pêche à la palangre qui représente une menace majeure, puisque de nombreux albatros périssent noyés, accrochés par les hameçons en essayant de s’emparer des appâts.
Les oiseaux nicheurs
Le spectacle de la migration et des va-et-vient des oiseaux qui circulent tout le long de nos côtes démontre que l’effectif des oiseaux côtiers est constitué essentiellement de migrateurs et d’hivernants. Néanmoins, notre littoral et les zones humides côtières constituent aussi des espaces de première importance pour la reproduction de nombreuses espèces d’oiseaux. Certaines d’entre elles sont considérées comme patrimoniales, puisque menacées au niveau national ou international et/ou confinées à seulement quelques sites de reproduction. Les différents paysages de notre littoral accueillent l’avifaune en période de reproduction. Les rebords des falaises offrent des possibilités d’installation aux Goélands, aux cormorans, aux fulmars et aux mouettes tridactyles, qui y construisent leurs nids. Des espèces beaucoup moins connues s’y reproduisent aussi, telles que les puffins et les océanites, qui occupent des cavités et des terriers placés en des secteurs inaccessibles sur les îles et les falaises rocheuses. Le macareux moine est une espèce emblématique de la conservation des sites marins. Oiseau symbole de la LPO en raison des actions de conservation qu’il suscite, il n’est plus présent que sur quelques rares sites de nidification en France. Il a subi un déclin dramatique durant les années 1960 et 1970 et se maintien vaille que vaille depuis. Le guillemot de Troïl et le pingouin torda ont subi le même triste sort et ne se reproduisent plus que dans quelques sites protégés de Bretagne. Le fou de Bassan a, quant à lui, progressé de manière très significative à la faveur de la protection de son unique colonie française : la réserve naturelle des Sept-îles, gérée par la LPO. Plus de 20 000 couples s’y reproduisent aujourd’hui. On peut considérer que cette espèce revient de loin. Quelques couples avaient commencé à nicher sur un des îlots des Sept-îles en 1950. Une progression régulière a eu lieu jusqu’en 1978, année de la marée noire de l’Amoco Cadiz. Cette catastrophe majeure a eu lieu au printemps, alors que les oiseaux étaient présents sur les colonies. Elle a entraîné un déclin important, que l’espèce a mis cinq à combler. C’est depuis une progression très forte que l’on observe, avec un léger ralentissement ces dernières années.