Primates : Des anciens aux modernes
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Primates : Des anciens aux modernes

Les hommes appartiennent  à la famille anthropoïde des grands singes, au même titre que les chimpanzés, les gorilles, les orangs-outans et, de façon plus éloignée, les gibbons. Nous avons tendance à penser que les grands singes, les primates sont issus d’une lignée plus récente que celle des singes. Mais, elle est, au contraire, plus ancienne et bien avérée, et ce sont les singes (en particulier le groupe des babouins, macaques et cercopithèques) qui sont les “petits jeunes”.

Avec plus de 200 kg, le Gigantopithecus est le plus grand primate qui ait jamais existé. Courant en Chine il y a 5 à 10 millions d’années, on ne le connaît que par ses dents fossilisées.

Les anciens grands singes :

Passés les riches dépôts fossilifères primitifs du Fayoum et d’ailleurs, l’histoire de l’évolution des primates dans le Nouveau Monde devient plus floue. Mais, à mesure que nous découvrons toujours plus de fossiles, vieux de quelque 20 millions d’années, il apparaît clairement que les primates du Fayoum s’étaient, à cette époque, séparés en deux grands groupes, les grands singes et les singes. Ces derniers sont néanmoins secondaires à ce stade, car les grands singes dormirent alors indubitablement l’Ancien Monde. Ils sont partout les 60 espèces connues occupant toute l’Afrique et s’étirant à travers le sud de l’Eurasie, depuis l’Espagne à l’ouest jusqu’en Chine à l’est. Bien qu’aucun ne semble être un ancêtre direct des grands singes actuels, ils n’en appartiennent pas moins à ce groupe : ils possèdent des molaires identiques et sont dépourvus de queue.

Les anciens grands singes ont largement prospéré, occupant nombre des forêts et niches fréquentées aujourd’hui par les singes. Certains étaient gigantesques. Le bien nommé Gigantopithecus, dont les deux espèces ont parcouru les zones boisées d’Inde et de Chine, il y a 5 à 10 millions d’années, pesait entre 200 et 300 kg. On ne les connaît que par leurs mâchoires et leurs dents, beaucoup utilisées dans l’herboristerie chinoise où on les incorporait, broyées, dans les remèdes traditionnels. Quatre fois plus lourd qu’un homme, le Gigantopithecus est le plus grand primate qui ait jamais vécu. Il était si imposant qu’il ne pouvait être qu’un herbivore terrestre.

Les plus grands singes se seraient laissés prendre de court par le climat devenu plus sec et plus froid il y a 10 à 15 millions d’années. Ces changements provoquèrent le déclin des forêts, qui se concentrèrent tout particulièrement en Afrique. Ce changement d’habitat, des forêts à des régions boisées plus ouvertes, joua en faveur des singes, en partie grâce à leur capacité à manger les fruits encore verts. Tous les grands singes, y compris les humains, en sont incapables. En effet, ils ne possèdent pas l’enzyme qui annihile les tanins protégeant les fruits avant que les graines ne soient prêtes à germer. Ces tanins toxiques donnent une sensation âpre dans la bouche (ainsi que des maux d’estomac, si ce n’est pire), avant de se décomposer naturellement à la maturité du fruit.

À la différence des grands singes, les singes possèdent cette enzyme. Aussi, lorsque les forêts commencèrent à décliner, les singes prirent le dessus en s’appropriant les fruits, plus rares, avant les grands singes. De surcroît, ils étendirent leur territoire à la savane et jusqu’à la lisière des forêts pour s’y nourrir des graines qui abondaient dans ces prairies. Les grands singes furent mis hors compétition et en payèrent le prix.

Une seule lignée de grands singes survécut et prospéra, mais ce fut de justesse. Elle sortit, elle aussi, des forêts pour aller habiter les zones boisées et les prairies. Pour le moins inadaptée à ses nouveaux habitats, elle fut à deux doigts de disparaître. Mais, elle survécut finalement et nous en sommes le produit.

 

Venus de forêts ancestrales, les vervets ont prospéré dans les sous-bois d’Afrique.

l’ascension des singes

Les singes de l’Ancien Monde ont bien sûr eux aussi leur histoire. L’étude de leur ADN confirme que leur ancêtre commun avec la lignée des grands singes remonte à quelque 25 millions d’années. Néanmoins, ils n’entraient que pour une part insignifiante dans le paysage africain et asiatique, et ce n’est que bien plus tard qu’ils sortirent des forêts et prospérèrent rapidement.

Les anciens singes d’Afrique ressemblaient aux colobes folivores qui vivent aujourd’hui dans les forêts d’Afrique subsaharienne. On ne sait pas très bien s’ils étaient folivores, mais une adaptation précoce à un tel régime semble possible. Lors du changement climatique survenu il y a 12 millions d’années environ, une nouvelle lignée de singes apparut : les Cencopithécinae (baboins, macaques, cercopithèques et leurs parents), frugivores et granivores.

Celle-ci fut vite représentée en Asie par les macaques, qui quittèrent leur habitat ancestral d’Afrique pour s’établir au sud de l’Europe, avant de conquérir l’Asie et de pousser jusqu’à l’archipel du Japon. Les babouins (l’espèce de singes la plus présente en Afrique), dont les données fossilifères remontent à 5 millions d’années, ont quant à eux évolué pour donner les cinq sous-espèces rencontrées aujourd’hui.

Squelette du babouin géant disparu Theropithecus oswaldi. Le gélada est aujourd’hui son plus proche parent.

Certains des anciens babouins étaient franchement exotiques. Le babouin géant herbivore Theropithecus oswaldi était de la taille d’un petit gorille. Il y a encore 50 000 à 100 000 ans, il parcourait les prairies de la savane d’Afrique de l’Est. Pourtant, sa corpulence et sa démarche lourde en faisaient une proie facile pour les chasseurs agiles de l’espèce humaine qui émergeait alors. Ses os abondent dans les campements fossiles d’Afrique, où nos ancêtres démembraient leurs proies. Son proche parent du nord du Kenya et du sud de l’Ethiopie, le Theropithecus brumpti, était sans doute deux fois plus petit, mais il compensait sa taille plus modeste par sa face spectaculaire.

Ses pommettes portaient des collerettes massives qui saillaient sur les côtés et vers l’avant, singularité que l’on ne connaît à aucune autre espèce de primates, éteinte ou vivante. On ne voit d’ailleurs guère quelle pouvait être leur utilité. Il est probable que les mâles usaient de leurs couleurs vives dans la compétition pour s’approprier les femelles, à l’instar des mandrills avec leur museau haut en couleur.

Dans les forêts d’Afrique centrale et occidentale, les “babouins des forêts” (le drill et le mandrill) ainsi que les mangabeys, plus proches des singes, évoluèrent jusqu’aux formes qu’on leur connaît aujourd’hui. Enfin, au fur et à mesure des avancées et des reculs de la glace depuis l’Eurasie vers le Nord, les petits cercopithèques se diversifièrent et envahirent les forêts d’Afrique centrale.

 

Le mandrill est un singe de grande corpulence qui vit au sol dans les forêts d’Afrique occidentale. L’évolution a doté les mâles de ces marques bleues et rouges qui témoignent probablement de la concurrence qu’ils se livrent entre eux.

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